QUAGHEBEUR : Anthologie de la littérature française de Belgique ; entre réel et surréel (2006)

Ce qu’ils en disent…

[RACINE.BE] Parcourir, à travers soixante textes, les deux derniers siècles de la production littéraire francophone en Belgique, tel est le défi que se fixe ce volume et le plaisir auquel il convie ses lecteurs. Composé de larges extraits en prose, ce volume plonge le lecteur dans l’extraordinaire prolifération d’une littérature qui démarre avant 1830 et n’est pas sans préparer et expliquer l’Indépendance. Une littérature qui ne cesse d’osciller entre réel et surréel tant le rapport à l’histoire, à la langue, à la forme et au mythe se joue sans cesse en décalages subtils, patents ou cachés, avec les modèles français. Répartis en cinq grandes tranches chronologiques, précédées d’une introduction aux époques en question comme aux livres et aux auteurs concernés, ce livre va de Moke dont le premier roman, Le Gueux de mer, date de 1827 à Amélie Nothomb en passant par De Coster, Maeterlinck, Thiry, Dotremont, Kalisky, Mertens, Lamarche… donne en outre aux lecteurs des indications sur la production en langue romane dans nos contrées jusqu’à la fin du XVIIe siècle et comporte desnotices sur chacun des 60 auteurs retenus. En restituant l’ancrage historique et littéraire de ces oeuvres, ce livre offre, à l’occasion des 175 ans de la Belgique, l’occasion d’une navigation au sein de textes qui témoignent tous d’une réelle singularité au Nord de la France.


QUAGHEBEUR Marc, Anthologie de la littérature française de Belgique ; entre réel et surréel est paru chez Racine en 2005 puis réédité en 2006. L’ouvrage est aujourd’hui épuisé mais fréquemment disponible en bouquinerie.

FR

EAN 9782873864330

384 pages


Ce que nous en disons…

Indispensable (cela vaut la peine de fouiller les bacs des bouquinistes…).

Patrick Thonart


L’auteur…

[MAISONDELAPOESIE.BE] Dans Tournai, ville en ruines avec près de 50% de son habitat touché par les bombardements, Quaghebeur naît le 11 décembre 1947. Trois ans plus tard commence une enfance auprès d’un grand-père maternel aimé et vénéré, qui vient de fermer son usine de chaussures parce que ses associés, détenteurs du capital, se refusent à moderniser l’outil. Venue au monde, en 1952, de son frère Philippe, avec qui il partagera la passion de l’art, lieu d’un dialogue infini, lieu transcendé d’un monde d’où le religieux s’est retiré. Études primaires dans une école de son quartier, puis secondaires au collège Notre-Dame avec des maîtres sévères qui donnèrent le goût du savoir et des cadres suffisamment solides pour qu’on en puisse sortir. Pratique le scoutisme, ce qui lui permet de découvrir la campagne tournaisienne, devient le chroniqueur de la troupe. Études universitaires à Louvain l’ancienne. Y connaît la dynamique généreuse de la vie communautaire, l’infamie du Walen buiten, le choc profond de 68 et la difficulté d’inscrire ces idéaux dans les faits. Reçoit l’enseignement de Jacques Schotte et de Louis Bolle. Prépare sous leur houlette au F.N.R.S. une thèse de doctorat consacrée à L’Œuvre nommée Rimbaud.

Publie ses premiers poèmes en 69, dans le recueil collectif Six jeunes poètes, conçu par Robert-Lucien Geeraert, l’animateur d’Unimuse. Rencontre Yves Bonnefoi qui lui fait découvrir Celan ; entre ensuite en relation avec Jouve et Mascolo. 1975 est l’année de la défense de sa thèse après qu’une camarilla conservatrice a tenté de l’empêcher d’en achever la rédaction, avant de lui barrer par la suite les portes du champ universitaire. Un an plus tard paraît Forclaz, chez Oswald, juste avant la faillite de celui-ci. Assiste au colloque Tel Quel à Cerisy-la-Salle avec Frans de Haes.

1977 le voit devenir conseiller littéraire et théâtral du Ministère de la Culture française à Bruxelles. Il est amené à promouvoir les méconnues lettres belges francophones et y consacrera désormais l’essentiel de son activité scientifique. Découvre en sa ville natale, à travers Conversation en Wallonie de Jean Louvet, la maîtrise et le projet théâtral du metteur en scène Marc Liebens avec qui il se lie d’amitié tout comme un peu plus tard avec René Kalisky et Jean Sigrid. Voit mourir d’anorexie sa première femme, Danièle Perrot, dit Nanou Richard, dont il est divorcé. Entreprend d’écrire le cycle de la morte dont la composition s’étalera sur quinze ans.

Avec Paul Willems, joue un rôle décisif dans les manifestations d’Europalia-Belgique en 1980. Construit et développe avec Joseph Hanse le Musée de la Littérature, tout en promouvant les grandes collections patrimoniales (Passé-Présent, Espace Nord, Archives du Futur) consacrées aux lettres belges et en en multipliant les structures de diffusion.

Baises pour l’histoire de nos lettres paraît en 82, suscitent des polémiques violentes dans la mesure où elles lient le devenir des oeuvres littéraires à l’histoire. C’est chez Fata Morgana que sortent l’année suivante les poèmes de Chiennelures.

À partir de 1985, entreprend une action systématique en faveur des lettres belges à l’étranger, tout en se battant en faveur d’une conception plurielle de la francophonie. Début d’une correspondance régulière avec Henry Bauchau et Jean-Claude Pirotte ; rapports amicaux aussi avec Sarah Kalisky, peintre, et Marc Trivier, photographe, d’où naîtront des oeuvres en intime collaboration. Devenu en 89 commissaire au livre de la Communauté française de Belgique, prépare diverses expositions consacrées aux Irréguliers du langage et plus tard à Paul Nougé. Découvre le Congo-Zaïre et met en chantier une série d’actions interculturelles sous la dénomination Papier blanc. Encre noire, parmi lesquelles la fondation de la revue Congo-Meuse. En 90 est impressionné par la découverte du palais de Charles-Quint à Yuste, ce qui engendre plusieurs textes autour de la figure de l’empereur et du XVIe siècle. Dégoût accru pour le cirque littéraire et pour l’imposture de la posture de l’artiste…


[INFOS QUALITE] statut : validé| mode d’édition : partage, recension, correction et iconographie | sources : librel.be ; maisondelapoesie.be | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, © J.L. Geoffroy.


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KLINKENBERG : Espace Nord – L’anthologie (1999)

Ce qu’ils en disent…

[LABOR] Dix ans, Cent titres. C’est ce que fête la collection Espace Nord avec le présent volume. L’objectif de cette collection était et continue à être de restituer au public du cap le plus septentrional de la francophonie sa littérature. De la restituer dans sa modernité, son urgence et son actualité. La présente anthologie – qui met 101 auteurs à l’honneur (Charles De Coster, Georges Eekhoud, Emile Verhaeren, Maurice Maeterlinck, Henri Michaux, Alexis Curvers, Marie Gevers, Henry Bauchau, Dominique Rolin etc.) – est sa carte de visite : elle montre comment une littérature toujours en formation et qui a eu ses timidités à illustré des sensibilités et fait valoir des univers que l’on a peu trouvés ailleurs. Les anthologies sont des outils à lire et à faire lire. Elles tracent des pistes, offrent des points de repère : tel fragment de grand roman, tel poème isolé, telle ligne provocante, tel moment suggestif. Ces pistes et ces repères ne veulent rien d’autre qu’éveiller le désir des textes complets. Mais elles ouvrent aussi à des échappées, à des voies de traverse. Sœurs en cela des dictionnaires, d’où l’on sort en ayant trouvé un trésor différent de celui qu’on cherchait, les anthologies participent d’une aventure. C’est à cette aventure qu’espace Nord convie aujourd’hui ses lecteurs.


EAN 9782507002374

KLINKENBERG Jean-Marie, Espace Nord : L’anthologie est paru chez Labor en 1999 et a été réédité chez Luc Pire en 2009. L’ouvrage est aujourd’hui épuisé mais fréquemment disponible en bouquinerie.

FR

EAN 9782507002374

479 pages

Epuisé (en date du 1 janvier 2025)


Ce que nous en disons…

Indispensable (cela vaut la peine de fouiller les bacs des bouquinistes…).

Patrick Thonart


L’auteur…

Jean-Marie Klinkenberg, né le 8 octobre 1944 à Verviers, est un linguiste et sémioticien belge. Professeur à l’université de Liège, il y a enseigné les sciences du langage, et spécialement la sémiotique et la rhétorique, mais aussi les cultures francophones. Il a développé une partie de ses travaux rhétoriques et sémiotiques au sein du Groupe µ.

[ULIEGE.BE] Les recherches de J.-M. Klinkenberg se sont orientées dans deux directions. Celle de la linguistique et de la sémiotique d’une part, celle des cultures francophones d’autre part. Dans la première orientation, il a fait sa marque en rénovant la rhétorique, dès la fin des années 1960, au sein de l’équipe interdisciplinaire mondialement connue sous le nom de Groupe µ, auteur collectif de Rhétorique générale (1970 ; un classique des sciences humaines, traduit en une vingtaine de langues et maintes fois réédité), de Rhétorique de la poésie (1977) et d’autres ouvrages.
Dans la seconde orientation, il a renouvelé l’approche des lettres belges, en envisageant celles-ci dans une optique sociale et institutionnelle, aisément transposable aux autres cultures francophones qu’il a étudiées, comme la québécoise. Il a contribué à dynamiser la recherche dans ces secteurs : il a ainsi été douze année durant président du plus ancien Centre d’Études Québécoises d’Europe, a créé à Liège le Centre d’études de la littérature belge et le Laboratoire des francophonies, et a contribué à fonder l’Association internationale des études québécoises. […] Jean-Marie Klinkenberg est aussi un intellectuel soucieux de mettre son savoir à la disposition de la société : consultant auprès de maisons d’édition (comme Larousse), il a aussi exercé diverses fonctions publiques. Il est par exemple actuellement président du Conseil de la langue française et de la politique linguistique de Belgique, charge qu’on lui a confiée à trois reprises. Il a également effectué de nombreuses missions d’expertise et de consultance. […] Il est depuis 1996 Membre de l’Académie Royale de Belgique.


[INFOS QUALITE] statut : validé| mode d’édition : partage, recension, correction et iconographie | sources : librel.be | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, © lesoir.be.


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WAGAMESE : Les étoiles s’éteignent à l’aube (2017)

Ce qu’ils en disent…

[LIBREL.BE] Lorsque Franklin Starlight, âgé de seize ans, est appelé au chevet de son père Eldon, il découvre un homme détruit par des années d’alcoolisme. Eldon sent sa fin proche et demande à son fils de l’accompagner jusqu’à la montagne pour y être enterré comme un guerrier. S’ensuit un rude voyage à travers l’arrière-pays magnifique et sauvage de la Colombie britannique, mais aussi un saisissant périple à la rencontre du passé et des origines indiennes des deux hommes. Eldon raconte à Frank les moments sombres de sa vie aussi bien que les périodes de joie et d’espoir, et lui parle des sacrifices qu’il a concédés au nom de l’amour. Il fait ainsi découvrir à son fils un monde que le garçon n’avait jamais vu, une histoire qu’il n’avait jamais entendue.


WAGAMESE Richard, Les étoiles s’éteignent à l’aube est paru chez Medicine Walk en 2014. Il a été traduit par Christine Raguet-Bouvert et est disponible en Zoe Poche depuis 2024.

EN (CA) > FR

EAN 9782264069702

308 pages

Disponible en grand format et poche


Ce que nous en disons…

Il est des lectures saines ou exaltantes que l’on commente volontiers autour d’un verre ou d’une table de bistrot. Peut-être se voudra-t-on plus intelligente, plus séduisant, plus imposante aussi, aux yeux de l’autre, des autres, ou, au contraire, plus sincère avec l’ami ou la copine. On échangera sur la force d’un texte, l’harmonie ressentie ou la sagesse de certains passages. Partager la découverte, s’en prévaloir : dans tous les cas, on passera par les mots, voire les discours. Du bruit, souvent.

Il y a également des livres rares qui sont suivis par un silence, un calme entièrement écrit sur la page blanche qui suit le mot ‘FIN’, la seule page que l’on emmènera avec soi et sur laquelle on pourra écrire à quatre mains, avec l’auteur, à l’encre d’une gratitude naturelle, cette gratitude qui fait circuler le sang quand au détour d’un chemin, un cerf apparaît, royal, qu’on n’espérait plus…

Le roman de Richard WAGAMESE (1955-2017), Les étoiles s’éteignent à l’aube (Medecine Walk, 2014) s’apparente à ceux-là : ces livres que l’on prête sans commentaire, que l’on offre avec la main sur l’épaule du proche que l’on aime ou… qu’on laisse traîner dans la bibliothèque des toilettes, dans l’espoir qu’un autre fasse la découverte.

Étonnamment, Starlight (posthume, 2018) ne recrée pas la magie initiatique du premier volet, Medecine Walk. Présenté comme un roman sylvothérapeutique par les critiques du Monde, il a été reconstitué par l’éditeur canadien de Wagamese après son décès en 2017. Si le roman était déjà bien avancé et l’entourage de Wagamese éclairé sur les intentions de l’auteur, ce sont des passages d’autres romans courts (des novellas où il fait intervenir les mêmes personnages) qui ont permis de boucler la copie, notamment pour la fin de l’histoire. Richard Wagamese avait par ailleurs indiqué qu’il voulait clôturer le texte sur la phrase : « Puis ils commencèrent à courir« .

Si la beauté simple du premier volet, Les étoiles s’éteignent à l’aube, se traduisait en phrases directes prononcées par des personnages rugueux dans les scènes urbaines, ou en évocations sobres de la puissance naturelle dans les passages plus sylvestres (qu’elle s’exprime dans la face d’un ours en colère ou dans le mouvement furtif d’une biche), elle est mise à mal dans Starlight, où s’installe la volonté d’expliquer, d’illustrer par des exemples (et, peut-être, de préparer un scénario de cinéma vendable). On passe de l’initiation rude mais sans violence de Medecine Walk, à une version didactisée et prévisible de l’école de vie que propose un Franklin Starlight trop lisse et monolithique. Le découpage même des différentes scènes sent le futur montage cinéma. Ceci, sans compter avec les fautes de traduction présentes dans les deux volumes (j’ai rarement vu un cow-boy imbibé employer le même vocabulaire que la comtesse de Ségur…).

Bref, si vous voulez lire Wagamese, peut-être devriez-vous commencer par Les étoiles s’éteignent à l’aube. Mais si vous voulez ne plus lire qu’un auteur avant de mourir, peut-être devriez-vous commencer par Wagamese

Patrick Thonart


Bonnes feuilles

« Pour le garçon, le vrai monde c’était un espace de liberté calme et ouvert, avant qu’il apprenne à l’appeler prévisible et reconnaissable. Pour lui, c’était oublier écoles, règles, distractions et être capable de se concentrer, d’apprendre et de voir. Dire qu’il l’aimait, c’était alors un mot qui le dépassait, mais il finit par en éprouver la sensation. C’était ouvrir les yeux sur un petit matin brumeux d’été pour voir le soleil comme une tache orange pâle au-dessus de la dentelure des arbres et avoir le goût d’une pluie imminente dans la bouche, sentir l’odeur du Camp Coffee, des cordes, de la poudre et des chevaux. C’était sentir la terre sous son dos quand il dormait et cette chaleureuse promesse humide qui s’élevait de tout. C’était sentir tes poils se hérisser lentement à l’arrière de ton cou quand un ours se trouvait à quelques mètres dans les bois et avoir un nœud dans la gorge quand un aigle fusait soudain d’un arbre. C’était aussi la sensation de l’eau qui jaillit d’une source de montagne. Aspergée sur ton visage comme un éclair glacé. Le vieil homme lui avait fait découvrir tout cela… »


L’auteur…

[en rédaction]



[INFOS QUALITE] statut : validé| mode d’édition : partage, recension, correction et iconographie | sources : librel.be ; zoe éditions | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, © Zoe.


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BAKEWELL : Au Café existentialiste (2019)

Ce qu’ils en disent…

[PHILOMAG.COM] Paris, 1932. Trois amis se réunissent dans un célèbre café de Montparnasse. Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir écoutent Raymond Aron, de retour de Berlin, parler d’une forme de pensée radicalement neuve qu’il a découverte : la phénoménologie. « Si tu es un phénoménologue, lance-t-il à Sartre, tu peux parler de ce cocktail et c’est de la philosophie ! » Intrigué et inspiré, Sartre élabore une théorie fondée sur l’existence vécue, dont le quartier de Saint-Germain-des-Prés va devenir l’emblème. L’existentialisme va faire vibrer Paris et se diffuser dans le monde entier, de l’après-guerre aux mouvements étudiants de 1968. Avec l’érudition et l’humour qui ont fait l’immense succès de Comment vivre ?, Sarah Bakewell fait revivre un courant fondateur de l’histoire de la pensée du XXe siècle et nous plonge dans l’atmosphère effervescente du Paris existentialiste. Sarah Bakewell redonne des couleurs à nos penseurs trop souvent figés dans un noir et blanc nostalgique.

BAKEWELL Sarah, Au café existentialiste ; la liberté, l’être et le cocktail à l’abricot est paru chez Albin Michel en 2018, dans une traduction de Pierre-Emmanuel Dauzat et Aude de Saint-Loup. Il est disponible en format poche depuis 2019.

UK > FR

EAN 9782253257837

600 pages

Ce que nous en disons…

[en rédaction]

Patrick Thonart

Bonnes feuilles…

[en construction]

L’auteur…

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) à : Bournemouth , le 03/04/1963
[BABELIO.COM] Sarah Bakewell est une romancière anglaise. Son enfance s’est passée partout en Europe puis en Australie. Revenue à Londres, elle a été conservatrice au département des incunables de la Wellcome Library avant de publier deux biographies remarquées. À Londres toujours, elle anime des ateliers d’écriture à la City University et travaille pour les collections de livres rares du National Trust. Comment vivre ? (How to Live, 2010) a reçu le National Book Critics Circle Award for Biography aux États-Unis, et le Duff Cooper Prize for Non-Fiction en Grande Bretagne. L’ouvrage a également figuré dans la sélection du Costa Biography Award et du Marsh Biography Award.
Site (EN) : http://www.sarahbakewell.com/

[INFOS QUALITE] statut : validé| mode d’édition : partage, recension, correction et iconographie | sources : librel.be | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : © Albin Michel.

BAKEWELL : Comment vivre ? Une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse (2013)

Ce qu’ils en disent…

[LIBREL.BE] Comment tirer parti de chaque instant ? Accepter la fin d’un amour ? Fuir l’habitude ? En deux mots : comment vivre ? Toutes ces questions, que chacun se pose aujourd’hui, Montaigne y a réfléchi et y a apporté des réponses dans ses Essais. D’où l’extrême modernité de la pensée de cet auteur qui, en écrivant sur sa vie, nous fournit les clés pour un art de vivre. Véritable phénomène d’édition en Angleterre et aux États-Unis, ce livre de Sarah Bakewell, abondamment nourri de citations des Essais, aborde de manière chronologique et thématique la vie de Montaigne, les événements qui ont marqué son temps, et nous tend un miroir où chacun peut se reconnaître.

Ce livre iconoclaste ravira tous ceux pour qui vivre et penser sont une seule et même chose. Indispensable !

François Busnel, L’Express

Sarah Bakewell réussit, avec beaucoup d’élégance, un vrai tour de force. […] Un livre populaire.

Roger-Pol Droit, Le monde des livres

[PHILOMAG.COM] « Nous sommes bêtes, mais nous ne saurions être autrement, alors autant se détendre et vivre avec«  : ainsi l’auteure britannique Sarah Bakewell résume-t-elle la philosophie de Montaigne. Le trait est provocateur mais sied à la gouaille tranquille du seigneur aquitain dont la vie et l’œuvre servent ici de matière à un questionnement plus que sérieux : « comment vivre ? » C’est qu’entre le souvenir d’une femme qui ne fait l’amour « que d’une fesse », les notes de lecture et le regard étrangement humain d’un chat, les Essais constituent l’une des tentatives de réponse les plus ambitieuses… et pragmatiques. À la traditionnelle biographie, Bakewell préfère l’habileté d’une promenade à gambades thématiques. Le point de départ : tomber de son cheval et frôler la mort. S’ensuit l’éveil à une vie que Montaigne veut « en toute douceur et liberté, sans rigueur et contrainte ». Il suffit de pouvoir se dire : « si j’avais à revivre, je revivrai comme j’ai vécu »». Apprentissage du latin, magistrature à Bordeaux, amitié intense avec Étienne de La Boétie, deuils, ennuis domestiques… l’écheveau complexe d’une vie se dévide sans autre fin qu’offrir à la vue les nerfs d’un philosophe, « un exemple ordinaire d’être vivant ».


 

BAKEWELL Sarah, Comment vivre ? Une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse  est paru chez Albin Michel en 2013, dans une traduction de Pierre-Emmanuel Dauzat. Il est disponible en Folio depuis 2014.

EN > FR

EAN 9782253000648576 pages

Disponible en grand format, ePub et poche


Ce que nous en disons…

Il n’est pas de meilleure introduction à la pensée de Montaigne. Simple et généreux, l’ouvrage ouvre les portes qui ouvrent sur les meilleurs miroirs…

Patrick Thonart


Bonnes feuilles…

« Comment affronter la peur de la mort ? Accepter la fin de l’amour ? Tirer parti de chaque instant ? En deux mots : comment vivre ?

Le XXIe siècle est plein de gens imbus d’eux-mêmes. Plongez une demi-heure dans l’océan virtuel des blogs, des tweets, des (you)tubes, des (my)spaces, des face(book)s, des pages et des pods, et vous verrez surgir des milliers d’individus fascinés par leurs propres personnes et essayant d’attirer l’attention à grands cris. Ils s’épanchent; ils se ‘livrent’, ils tchattent et mettent en ligne les photos de tout ce qu’ils font. Extrovertis dénués de toute inhibition, ils se regardent le nombril comme jamais ils ne l’ont fait. Lors même qu’ils sondent leur expérience privée, bloggers et networkers communiquent avec leurs semblables dans un festival communautaire du moi.

Des optimistes ont essayé de faire de cette rencontre mondiale des esprits la base d’une nouvelle approche des relations internationales. L’historien Theodore Zeldin a lancé un site, The Oxford Muse, qui invite les gens à concocter de brefs autoportraits en mots, à décrire leur vie quotidienne et ce qu’ils ont appris. Ils les mettent en ligne pour les donner à lire et susciter des réactions. Pour Zeldin, le dévoilement de soi partagé est la meilleure manière de faire naître la confiance et la coopération à travers la planète, en remplaçant les stéréotypes nationaux par de vrais gens. La grande aventure de notre époque, dit-il, est « de découvrir qui habite le monde, un individu à la fois« . L’Oxford Muse fourmille donc d’essais personnels ou d’entretiens avec des titres du genre : Pourquoi un Russe qui a fait des études fait des ménages à OxfordPourquoi être coiffeur comble le besoin de perfection, Comment écrire un autoportrait vous montre que vous n’êtes pas celui que vous croyiezCe que vous pouvez découvrir si vous ne buvez ni ne dansezCe qu’une personne ajoute à ce qu’elle dit dans la conversation quand elle parle d’elle par écritComment réussir quand on est paresseuxComment un chef exprime sa bonté...

En décrivant ce qui les rend différents de tous les autres, les contributeurs révèlent ce qu’ils partagent avec tout le monde : l’expérience de l’humanité. Cette idée – écrire sur soi pour tendre aux autres un miroir où ils reconnaissent leur propre humanité – n’a pas toujours existé. Il a bien fallu l’inventer. Et, à la différence de maintes inventions culturelles, on peut l’attribuer à une seule personne : Michel Eyguem de Montaigne, noble, magistrat et viticulteur, qui vécut dans le Périgord de 1533 à 1592.

C’est tout simplement en le faisant que Montaigne en conçut l’idée. Contrairement à la plupart des mémorialistes de son temps, il n’écrivit pas pour rapporter ses prouesses et ses réalisations. Pas davantage il ne coucha par écrit la chronique des événements historiques dont il fut le témoin direct, quand bien même il aurait pu le faire: au cours des décennies passées à incuber et écrire son livre, il vécut une guerre de religion qui faillit détruire son pays. Appartenant à une génération flouée de l’idéalisme prometteur dont jouissaient les contemporains de son père, il s’adapta aux misères publiques en concentrant son attention sur la vie privée. Il survécut aux troubles, supervisa son domaine, trancha des affaires en sa qualité de magistrat et fut le maire de Bordeaux le plus accommodant de son histoire. Dans le même temps, il composa des textes exploratoires, sans attaches, auxquels il donna des titres simples : De l’amitiéDes cannibalesDe l’usage de se vêtirComme nous pleurons et rions d’une même choseDes nomsDes senteursDe la cruautéDes poucesComme notre esprit s’empêche soi-mêmeDe la diversionDes cochesDe l’expérience

Au total, il écrivit cent-sept essais de cette nature. D’aucuns couvrent une page ou deux ; d’autres sont beaucoup plus longs, en sorte que les éditions les plus récentes de la série complète couvrent plus d’un millier de pages. Ils proposent rarement d’expliquer ou d’enseigner quoi que ce soit. Montaigne se présente comme quelqu’un qui s’est contenté de coucher par écrit ce qui lui passait par la tête lorsqu’il prenait sa plume, saisissant rencontres et états d’esprit comme ils venaient. Et de ces expériences, il fit une base pour se poser des questions, par-dessus tout la grande question qui le fascina comme elle fascina tant de ses contemporains. Deux mots tout simples suffisent à la formuler : Comment vivre ?

À ne pas confondre avec la question éthique : « Comment doit-on vivre ? » Les dilemmes moraux intéressaient Montaigne, mais ce que les gens devraient faire l’intéressait moins que ce qu’ils faisaient vraiment. Il voulait savoir comment vivre une vie bonne, par quoi il faut entendre une vie correcte et honorable, mais aussi une vie pleinement humaine, satisfaisante et florissante. Cette question l’amena à la fois à écrire et à lire, car il était curieux de toutes les vies humaines, passées et présentes. Il ne cessait de s’interroger sur les émotions et les mobiles qui poussaient les gens à agir ainsi qu’ils le faisaient. Et comme il était l’exemple le plus proche qu’il eût sous la main d’un être humain vaquant à ses occupations, il s’interrogea tout autant sur lui-même.

Une question prosaïque, « Comment vivre ?« , éclatée en une myriade d’autres questions pragmatiques. Comme tout le monde, Montaigne buta sur les grandes perplexités de l’ existence : comment affronter la peur de la mort, comment se remettre de la mort d’un enfant ou d’un ami cher, comment se faire à ses échecs, comment tirer le meilleur parti de chaque instant en sorte que la vie ne s’épuise pas sans qu’on l’ait goûtée ? Mais il est aussi de moindres énigmes. Comment éviter de se laisser entraîner dans une dispute absurde avec son épouse, ou un domestique ? Comment rassurer un ami convaincu qu’un sorcier lui a jeté un sort ? Commet ragaillardir un voisin éploré ? Comment garder sa maison ? Quelle est la meilleure stratégie à adopter si vous êtes tenus en respect par des voleurs en armes qui n’ont pas l’air de savoir s’ils vont vous tuer ou vous rançonner ? Si vous surprenez la gouvernante de votre fille qui lui prodigue de mauvais conseils, est-il sage d’intervenir ? Comment faire face à un taureau ? Que dire à votre chien qui a envie de sortir jouer, quand vous souhaitez rester à votre pupitre pour écrire votre livre ?

Au lieu de réponses abstraites, Montaigne nous dit ce qu’il fit à chaque fois, et quel était son sentiment quand il le fit. Il nous donne tous les détails dont nous avons besoin pour toucher du doigt la réalité, et parfois plus qu’il ne nous faut. Il nous dit, sans raison particulière, que le melon est le seul fruit qu’il aime, qu’il préfère faire l’amour couché que debout, qu’il ne sait pas chanter, qu’il aime la compagnie enjouée et se laisse souvent emporter par l’étincelle d’une répartie. Mais il décrit aussi des sensations qu’il est plus difficile de saisir verbalement, si même on en a conscience : ce que ça fait d’être paresseux, ou courageux, ou indécis ; de s’abandonner à un instant de vanité, ou d’essayer de se défaire d’une peur obsédante. Il écrit même sur la sensation pure d’être en vie.

Explorant ces phénomènes sur plus de vingt ans, Montaigne se questionna sans relâche et brossa son portrait : un autoportrait en mouvement constant, si vivant qu’il surgit pour ainsi dire de la page, pour venir s’asseoir à côté de vous et lire par-dessus votre épaule. Il lui arrive de tenir des propos surprenants : bien des choses ont changé depuis la naissance de Montaigne, voici près d’un demi-millénaire, et ni les mœurs ni les croyances ne sont toujours reconnaissables. Lire Montaigne, ce n’en est pas moins éprouver maintes fois le choc de la familiarité, au point que les siècles qui le séparent du nôtre sont réduits à néant. Les lecteurs continuent de se reconnaître en lui, tout comme les visiteurs d’Oxford Muse se reconnaissent ou reconnaissent des aspects d’eux-mêmes dans le récit d’un Russe instruit qui fait des ménages ou dans l’expérience de celui qui préfère ne pas danser.

Dans un article à ce sujet paru dans le Times en 1991, le journaliste Bernard Levin écrivait: « Je mets tout lecteur de Montaigne au défi de ne pas poser le livre à un moment ou à un autre pour s’écrier, incrédule: « Comment a-t-il su tout cela de moi ? » La réponse est, bien entendu, qu’il le sait en se connaissant lui-même. À leur tour, les gens le comprennent parce qu’eux aussi savent tout cela sur leur propre expérience. Comme l’écrivit au XVIIe siècle Blaise Pascal, un de ses premiers lecteurs les plus obsessionnels : Ce n’est pas dans Montaigne mais dans moi que je trouve tout ce que j’y vois. »

Sarah Bakewell


L’auteur…

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) à : Bournemouth , le 03/04/1963
[BABELIO.COM] Sarah Bakewell est une romancière anglaise. Son enfance s’est passée partout en Europe puis en Australie. Revenue à Londres, elle a été conservatrice au département des incunables de la Wellcome Library avant de publier deux biographies remarquées. À Londres toujours, elle anime des ateliers d’écriture à la City University et travaille pour les collections de livres rares du National Trust. Comment vivre ? (How to Live, 2010) a reçu le National Book Critics Circle Award for Biography aux États-Unis, et le Duff Cooper Prize for Non-Fiction en Grande Bretagne. L’ouvrage a également figuré dans la sélection du Costa Biography Award et du Marsh Biography Award.
Site (EN) : http://www.sarahbakewell.com/


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