JUDET de LA COMBE : Quand les Dieux rôdaient sur la Terre (2024)

Ce qu’ils en disent…

[ALBIN-MICHEL.FR] Zeus, Aphrodite, Athéna, Dionysos, Apollon… Tous les secrets des Dieux et des Déesses qui rôdaient autrefois sur la Terre. Pierre Judet de La Combe nous fait voyager à travers les nombreux mythes de la mythologie : histoires merveilleuses, invraisemblables, inattendues. Un livre pour revivre l’expérience de ce monde ancien et surprenant, où l’Océan, les Fleuves, le Soleil ne sont pas des éléments désincarnés, mais s’adressent aux habitants de la Terre, où les puissances invisibles qui décident des vies et des sociétés humaines descendent de l’Olympe ou surgissent des entrailles de la terre ou de la mer pour se montrer, parler et s’affronter aux humains.

Réunis dans un livre, ces récits ne perdent rien de leur charme addictif.

Le Monde

[LESBELLESLETTRES.COM] Il était une fois, en Grèce, des êtres extraordinaires. Ce sont leurs histoires qui nous sont ici racontées. Des histoires merveilleuses, invraisemblables, inattendues, qui nous propulsent de Troie à Thèbes, et aux limites du monde, entre Ciel et Terre.
Véritable voyage à travers la mythologie, ce livre, qui reprend la première saison de l’émission de France Inter Quand les dieux rôdaient sur la Terre, fait revivre un monde ancien et surprenant, où l’Océan, les Fleuves, le Soleil ne sont pas des éléments désincarnés, mais s’adressent aux habitants de la terre, où les puissances invisibles qui décident des vies et des sociétés humaines descendent de l’Olympe ou surgissent des entrailles de la terre ou du fond des mers pour se montrer, parler et faire face aux humains.
Apollon, le voyou magnifique ; Artémis, belle et féroce ; Hermès, fourbe et farceur ; Prométhée, le voleur de feu… Pierre Judet de La Combe nous rappelle que, si les mythes nous parlent encore aujourd’hui, c’est parce qu’ils cherchent à expliquer la finitude humaine, et que, dans un monde sans salut, ils font surgir en nous le plaisir d’un imaginaire libre et merveilleux, qui permet de se repérer dans les brutalités de la vie.

[PHILOMAG.COM] Tous les samedis matin, l’helléniste Pierre Judet de La Combe ramène les auditeurs de France Inter au temps où les dieux se mêlaient aux humains, ne lésinant pas sur les apparitions sous déguisement et les signes plus ou moins cryptiques. Présenter le corpus mythologique sous un angle neuf n’est pas chose facile : qu’ont encore à nous apprendre Héraclès, Médée, Thésée ou Dionysos ? Pierre Judet de La Combe raconte et revient ainsi aux sources de la poésie grecque, de la transmission orale de récits qui n’avaient rien d’un divertissement mais participaient de la vie spirituelle et politique. Le dieu de l’ivresse et des excès se rapporte ainsi à une certaine appréhension du temps rythmé par les célébrations et la musique, celle des tambours et autres percussions, et non pas celle, harmonieuse, de la lyre d’Apollon. Le voleur de feu Prométhée n’est pas le rebelle que l’on croit mais plutôt le complice d’un Zeus qui s’ennuie de régner sur un monde à l’équilibre trop parfait : y intégrer les humains permet de ramener de l’imprévu, de l’excitation, sans trop non plus menacer l’ordre des dieux. La mère infanticide Médée est peut-être la véritable outsider : alors que Jason la délaisse pour une autre et pour un meilleur statut social, comme n’importe quel mari grec aurait pu le faire, elle se révolte, traite les hommes de « piètres raisonneurs. » On sait la violence du geste qu’elle accomplira – un mystère, commente l’auteur. C’est à toucher un peu de l’énigme de cette civilisation à la fois si proche et lointaine que nous invitent les histoires de Pierre Judet de La Combe : une odyssée à traverser bien au chaud sur son canapé.


JUDET de LA COMBE Pierre, Quand les Dieux rôdaient sur la Terre est paru chez Albin Michel en 2024.

FR

EAN 9782226498236

608 pages

Disponible en grand format et ePub.


Ce que nous en disons…

Quelle belle approche ! Habile conteur, Pierre Judet de La Combe (eh oui, il y a des gens qui s’appellent comme ça…) réussit à nous rendre familière l’intrication des dieux grecs et les contradictions kafkaiennes de leurs actions parmi les humains. On est dans de « l’anti-Marvel » : l’auteur renonce dans chaque chapitre à faire l’hagiographie d’un super-héros spécifique, et rend la complexité des interventions de ceux-là qui trônent sur l’Olympe mais descendent parmi nous rebattre les cartes du quotidien. C’est un helléniste éclairé qui raconte combien les péripéties des différents mythes sont variées et liées au conteur lui-même. Ce faisant, il sait isoler la dorsale profonde de chaque histoire, là où est la leçon immuable qui, déjà dans l’Antiquité, animait la pensée des humains face à ce mystérieux déroulé de phénomènes qu’on appelle depuis longtemps… la Vie.

Patrick Thonart


Bonnes feuilles…

THESEE SERIAL LOVER, SAISON 2 : PHEDRE

Quand les dieux rôdaient sur la Terre…
Il y a très longtemps, en Grèce, il fallait faire très attention avec les dieux. Ils étaient grands, forts, immortels, ils étaient parfois aimants, généreux, aidants, si on savait les prier comme il fallait et leur adresser les bons sacrifices, mais ils étaient aussi très capricieux, comme des gosses. Ils avaient beau être grands, forts, immortels comme doivent l’être des dieux et des déesses normalement constitués, ils avaient aussi une forte tendance à réagir comme nous, les humains. Ils étaient susceptibles, jaloux, colériques, râleurs, mesquins. Si on ne les aimait pas assez, ils devenaient furieux, exactement comme nous.

Nous, les humains, nous étions pour ces dieux des presque rien, des petits mortels voués à vieillir, puis à disparaître, tout leur contraire. Mais ce que les dieux et les déesses aimaient le plus, c’était notre vénération, notre amour, et toutes les offrandes que l’on pouvait leur faire sur leurs autels, lors des sacrifices. Si un dieu se sentait négligé, c’était la catastrophe. En fait, les dieux dépendaient entièrement de nous, les humains.

Les dieux nous regardaient d’en haut, depuis leur Olympe, ou au contraire d’en bas, depuis le fond des mers ou depuis le fin fond de la terre, et ils avaient du mépris pour nos faiblesses, pour notre incapacité à nous guérir de la mort. Nous voir maladroits, malhabiles, peu adaptés à ce monde qu’ils administraient, cela les faisait rire. Mais ils n’attendaient qu’une chose : qu’on leur rende hommage. Sinon, c’était la crise. Ils devenaient méchants, les dieux aussi bien que les déesses, ce qui les amusait : ils y prenaient plaisir. Ils montraient par là qu’ils étaient vraiment les plus forts, eux, les dieux Bienheureux.

Le problème, pour les humains, c’était qu’il y en avait beaucoup, de dieux et de déesses. Il fallait les aimer tous, ou les redouter tous, en leur faisant suffisamment d’offrandes pour qu’ils soient tous bienveillants. Il ne fallait en oublier aucun, et on ne pouvait pas vraiment faire son choix et préférer tel ou tel dieu. Si on aimait trop l’un, ou l’une, une autre divinité pouvait se fâcher, se sentir lésée. Alors, elle frappait fort. Pas seulement pour nous punir, mais aussi pour faire la nique à l’autre dieu, à celui ou celle qui avait été trop aimé, aux dépens des autres. Les dieux se vengeaient entre eux. Bref, ces dieux étaient comme nous.

On pourrait se dire que tout cela ne fait pas une vraie religion, que c’est infantile, un peu bébête, ces dieux perpétuellement jaloux, entre eux et vis-à-vis des humains. De nombreux philosophes de l’Antiquité l’ont pensé, et ils ont protesté contre ces histoires monstrueuses de dieux mesquins, cruels, prêts à tous les vices, des dieux beaucoup trop humains. Ils n’en voulaient plus. Ils voulaient des dieux parfaits, purs, vraiment divins. Mais, Dieu merci, on ne les a pas trop écoutés, pendant longtemps.

En effet, ils sont vraiment intéressants ces dieux, et utiles. Comme ils sont toujours en rivalité les uns avec les autres, comme ils ne se font pas de quartier (sauf quand ils se réunissent pour faire la fête, boire et chanter dans l’Olympe), ils nous rappellent ce qu’est le monde : complexe, difficile, opaque, traversé de forces contradictoires, en opposition les unes aux autres.

On ne peut pas vivre, agir dans ce monde avec des idées trop simples, trop fermées. Il y a toujours un dieu, quelque part, qui peut concocter une mauvaise surprise. Il faut tout envisager, accepter que la réalité ne peut pas se comprendre d’un seul point de vue. Dans ce monde gouverné par les dieux, les humains devaient avoir une intelligence multiple, une « intelligence nombreuse« , comme dit le poète Homère à propos d’Ulysse, ce héros vif et tournoyant, qui a toujours su s’en sortir.

Cette rivalité entre divinités est bien ce qui a mené à sa perte la famille du héros Thésée, le fort et très beau Thésée, dont nous avons commencé à suivre la fabuleuse histoire. Histoire fabuleuse, mais qui montre aussi les faiblesses de ce grand homme, qui n’a pas toujours eu l’intelligence fine et multiple du merveilleux Ulysse, et qui s’est souvent retrouvé le bec dans l’eau, par ses propres fautes.

On a vu combien Thésée était, malgré ses défauts, adoré de la ville d’Athènes, qui en a fait son roi mythique, son véritable fondateur, son idole. Chéri des dieux, et notamment de celui qui passait pour être son père, Poséidon, dieu de la mer, il a accompli de grands exploits, estourbi toute une série de gens très méchants, qui maltraitaient leurs semblables, toute une série de bêtes féroces et monstrueuses, comme le gros taureau qui dévastait le pays de Marathon, au nord d’Athènes. Et, surtout, il a pris la mer et il est allé en Crète pour se battre victorieusement contre le Minotaure, dans le Labyrinthe. Si Thésée pouvait par sa force, par ses muscles, assommer sans trop de problème ce monstre à la fois bovin et humain, il n’aurait as pu échapper au Labyrinthe sans l’intelligence et l’amour d’Ariane, et sans l’aide de son fil. Les gros muscles de Thésée n’auraient pas suffi.

Cette expérience lui a appris que le monde était compliqué, difficile, impossible à maîtriser d’un seul regard. Thésée a eu à affronter un monstre double, animal et humain, dans un Labyrinthe dont la sortie était introuvable sans une ruse, le fil d’Ariane. Thésée a eu de la chance de pouvoir bénéficier de l’amour de quelqu’un d’autre. Seul, il n’aurait pas triomphé.

Ce Labyrinthe était à l’image de ce qu’est le monde pour les humains : une réalité inextricable, difficile à saisir, sans repère fixe, où l’on va et vient, où l’on ne cesse d’être ballotté entre un chemin puis un autre. Il fallait de la ruse pour s’en sortir, et avoir l’appui de quelqu’un. Mais Thésée a oublié tout cela, il n’a pas bien appris la leçon ; ou, plutôt, il est devenu comme le Minotaure, ou comme le Labyrinthe, un être double, indécis, confus, labyrinthique. Sans Ariane, il a perdu le fil.

Ainsi on se souvient que Thésée, après avoir juré un amour perpétuel à la belle riane, l’oublie finalement endormie sur la plage de Naxos, où il fait escale sur le chemin du retour vers la Grèce. Puis Thésée, décidément oublieux, oublie aussi son père, le roi Égée, qui lui avait demandé à son départ de hisser une voile blanche sur son navire, en cas de victoire. Égée qui guette le retour du bateau voit surgir au large une voile funèbre, toute noire et se tue en se jetant dans la mer.

Thésée revient à Athènes, à la fois en triomphateur et en fils afRigé. Ses oublis ne l’ont pas empêché d’être un très grand roi, dit-on. D’abord, il passe pour être le véricable fondateur de la cité d’Athènes. Il a fait de la grande politique, en agglomérant les différentes bourgades du pays en une seule cité, une véritable unité politique. Athènes, grâce à Thésée, est devenue un vaste ensemble territorial, qui réunissait à la fois la ville, la campagne et ses villages, et le bord de mer, dans une belle harmonie physique, humaine, religieuse et politique. Une cité unie.

Thésée a aussi créé les institutions équilibrées, stables et justes, qui permirent à cette grande unité de vivre, de prospérer. Il était même parfois considéré, lui le roi, comme le champion de la démocratie athénienne. Face à un roi étranger, tyrannique et menaçant, qui voulait le contraindre et lui faire la guerre, Thésée aurait dit fièrement:

Rien n’est plus ennemi d’une cité qu’un tyran.
D’abord, parce que avec un tyran, il n’y a pas de lois
communes. Un seul homme a le pouvoir et fait de la loi sa chose à lui, et il n’y a plus aucune équité.
Quand il y a des lois écrites, l’homme démuni
et le riche ont droit à une justice égale.
Les démunis ont la possibilité de s’en prendre
aux fortunés avec les mêmes mots, si on parle mal d’eux. Le petit l’emporte sur le grand, s’il a le droit pour lui. […]
Quand le peuple a l’autorité sur un pays,
il se réjouit de pouvoir compter sur de jeunes habitants. Le roi a cela en horreur.
Il tue les meilleurs, ceux dont il pense qu’ils réfléchissent,
car il tremble pour son pouvoir tyrannique. Comment une cité pourrait-elle rester forte si, comme l’épi dans une prairie de printemps, on extirpe la bravoure et on fauche la jeunesse ?

[Euripide, Suppliantes, v. 429-449]


L’auteuR…

Pierre Judet de La Combe (né en 1949) est helléniste et philologue, directeur d’études à l’EHESS et directeur de recherche au CNRS. Il a traduit et commenté de nombreux textes de la poésie et du théâtre grecs et participé à plusieurs productions théâtrales (avec Ariane Mnouchkine, notamment). On lui doit, chez Albin Michel, la nouvelle traduction de l’Iliade (Tout Homère, 2019), et L’Avenir des Anciens. Oser lire les Grecs et les Latins (2016). Tous les samedis matin, sur France Inter, il anime l’émission à succès Quand les dieux rôdaient sur la Terre dont le livre est une adaptation.


[INFOS QUALITE] statut : validé| mode d’édition : partage, recension, correction et iconographie | sources : librel.be ; albin-michel.fr | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : en-tête, © telerama.fr.


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GAUQUELIN : De mémoire d’arbre (2024)

Ce qu’ils en disent…

[SOCIETEBOTANIQUEDEFRANCE.FR] « Je m’appelle Adrouman et j’ai 517 ans… » Notre collègue Thierry Gauquelin, Professeur émérite à l’Université d’Aix Marseille, publie De mémoire d’arbre, un roman scientifique aux éditions Tana.

Je m’appelle Adrouman et j’ai aujourd’hui 517 ans… Ou à peu près. Je suis un arbre, un genévrier thurifère, Juniperus thurifera en latin. J’habite les hauts sommets de l’Atlas marocain, là où seuls les individus de mon espèce peuvent se développer, entre la rigueur de l’hiver et la sécheresse de l’été. Les conditions de ma naissance m’ont été contées par un proche voisin et ami, mon aîné d’une centaine d’années… En l’an 1505, 910 de l’hégire, à l’heure du soleil couchant d’une fin d’octobre.

C’est sur ces mots […] que s’ouvre le roman. Il s’agit du récit, à la première personne, d’un très vieux genévrier des Atlas marocains, qui nous raconte ses cinq siècles d’existence, au milieu des siens. Les premiers chapitres concernent sa naissance, sa croissance, sa morphologie (son tronc, ses feuilles, ses racines, etc) et son environnement forestier immédiat. L’occasion d’aborder son adaptation aux conditions difficiles de la haute Montagne.

Ce sont ensuite les rencontres qu’il a pu faire, de Léon l’Africain, à l’origine de sa naissance, au Maréchal Lyautey, défenseur des forêts marocaines. Mais aussi avec des animaux, comme le dernier lion de l’Atlas qui vient mourir à son pied. Illustration de la perte de biodiversité… Il dévoile également l’expérience scientifique unique dont il a été le protagoniste, qui permet d’évoquer la recherche scientifique en écologie.

On se retrouve immergé au cœur des Atlas marocains, où destin des arbres et destin des hommes s’entrecroisent. Notre genévrier est ainsi confronté tant à la hache du berger et à la dent du troupeau qu’au changement climatique auquel il doit s’adapter. Le vieil arbre nous pousse alors à réfléchir à la pression que nous exerçons sur le vivant. C’est aussi un appel pour cesser de considérer les arbres comme des choses esthétiques ou utilitaires, et les voir enfin pour ce qu’ils sont, des colocataires de la même planète, indispensables à notre propre survie.

[LISEZ.COM] Quand un genévrier des Atlas marocains séculaire nous raconte son existence semée d’embuches et de rencontres. Si les arbres pouvaient parler… Ce roman écrit à la première personne nous immerge au coeur des montagnes, dans une nature aussi fascinante que rude, où le destin des arbres et celui des hommes sont étroitement liés. Confronté tout à la fois à la hache du berger et à la dent du troupeau, un genévrier de l’Atlas marocain raconte ses cinq siècles d’existence. Le vieil arbre nous pousse à réfléchir à la pression que nous exerçons sur le vivant. C’est aussi un appel pour cesser de considérer les arbres comme des choses esthétiques ou utilitaires, et les voir enfin pour ce qu’ils sont : des colocataires de la même planète, indispensables à notre propre survie.


GAUQUELIN Thierry, Prénom, De mémoire d’arbre est paru chez Tana en 2024.

FR

EAN 9791030105476

160 pages

Disponible en grand format et ePub.


Ce que nous en disons…

L’idée pouvait facilement basculer dans la ringardise scolaire : donner la parole à l’objet que l’on veut documenter (« Bonjour, les petits enfants, je m’appelle ‘climat’ et je me réchauffe un peu plus tous les jours…« ). Thierry Gauquelin a réussi la gageure et à aucun moment on ne doute de la noble parole de cette arbre qui affiche plus de 5 siècles au compteur. « Cette » car il s’agit d’une arbre femelle. Le saviez-vous : dans le cas des plantes dioïques, les arbres ou les fleurs femelles produisent des graines de fruits quand les fleurs ou les plantes mâles produisent du pollen. Nous voilà instantanément plus malins ! « Compteur » car Dame Thurifera a vu passer de nombreux scientifiques sous sa canopée, qui ont établi les données que l’auteur liste également. La beauté de cet ouvrage est ailleurs : si la pédagogie est évidente et la vulgarisation efficace, les savoirs ne sont rien s’ils ne mènent à la connaissance. Or, le dispositif utilisé par Gauquelin nous accorde avec l’intimité et l’histoire de ce genévrier et les péripéties de sa longue existence résonneront longtemps dans le coeur du lecteur. Pas question d’ennui, pas question d’études en vue d’un examen : chacun peut goûter et partager un vrai témoignage et, comme dans les meilleurs dessins animés, donner un visage à ce tronc centenaire. Et avec le visage authentique naît le dialogue…

Patrick Thonart


Bonnes feuilles…

Genévrier thurifère de l’Atlas © Margaux Bidat

L’auteur…

Thierry Gauquelin est professeur émérite à Aix-Marseille Université et membre de l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Écologie marine et continentale (IMBE). Il s’intéresse depuis plus de quarante ans à la biodiversité et au fonctionnement des écosystèmes forestiers, notamment méditerranéens et montagnards.


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JANNE d’OTHEE : Belgique. L’histoire sans fin (2024)

Ce qu’ils en disent…

[LE-CARNET-ET-LES-INSTANTS.NET] Au premier regard, compte tenu du format (à peine 90 petites pages) et de l’illustration de l’emballage (des cornets de frites qui alternent avec un motif typiquement magrittien), on pourrait croire à un énième petit manuel de savoir-belgiquer, au mieux une sympathique déambulation livresque qu’on pensera à coincer dans son sac-banane entre deux paquets de spéculoos, le temps de pédaler une après-midi entre Le Zoute et La Panne, s’il nous prenait de faire une pause lecture dans le Zwin.

Puis, dès la première page, le jugement se trouve réévalué. Bien sûr, on savait depuis le héros brabançon créé par Jean Muno que, chez nous, certaines rues étaient coupées en deux par la frontière linguistique, mais il faut l’avouer, on ignorait l’existence de ce petit village de L’écluse, dont François Janne d’Othée parvient à dédramatiser l’absurdité foncière sans pour autant lui faire perdre tout sérieux. Il fait plus fort encore quand, à la question oratoire « Moules-frites, surréalisme et autodérision, sont-ce là les quelques ingrédients de la Belgitude ? », il ose répondre avec un accent emprunté au Picard (Edmond) : « C’est dans ce flou qu’il faudra débusquer l’âme belge. » Nous voilà bien paf, nous les Dikkenek convaincus de tout connaître d’un territoire si petit qu’il n’y a sans doute pas grand-chose à en savoir, et maintenant persuadés que ce mince volume nous ménage plus d’une surprise, oufti !, et d’une révélation, allez dit !

François Janne d’Othée, journaliste international, nous fait déambuler dans les moindres recoins de son pays natal et nous les éclaire tantôt à la lampe de mineur, tantôt au lampion de bal du 21 juillet. Enjambant les évidences, bondissant sur les stéréotypes, circulant en équilibriste sur les lignes de crêtes de nos divisions internes, le piéton prend aussi volontiers le train, fleuron national depuis 1835, ou se perd au fil des canaux flamands pour tracer une géographie de cœur comme de raison. Les anecdotes s’enchaînent, les noms foisonnent – d’esprits en quête d’innovation, d’athlètes, de mécènes, d’artistes – pourtant ce cramignon ne donne pas le tournis. Au contraire, embrassant beaucoup il étreint bien grâce à son style souple, et permet de mesurer, en quelques pages, notre ampleur et notre amplitude.

Chauvinisme cocoriquant ? Plutôt salubre piqûre de rappel sur nos complexes et nos complexités, sur les défauts de nos qualités et l’inverse. C’est ce que semblent d’ailleurs confirmer le président du Crisp Vincent de Coorebyter, l’historienne Els Witte et le comédien Sam Touzani. Trois regards nuancés, trois sensibilités invitées à dialoguer avec l’auteur en fin de volume. Au terme d’une fine analyse de la situation politique contemporaine, le premier déplore la difficulté croissante à honorer notre longue réputation d’experts en compromis ; la seconde revient aux racines de l’orangisme pour retracer deux siècles de rapports Nord-Sud et d’évolution politique louvoyante, de l’unitarisme au fédéralisme ; le dernier conclut sur un éloge de l’hybridité et brandit la fierté d’être à part entière un pur zinneke, ce qui est encore un oxymore conforme à notre identité profonde.

Un petit ouvrage à mettre en toutes les mains. Et d’abord celles des habitants d’Outre-Quiévrain.

Frédéric Saenen


JANNE D’OTHEE François, Belgique : L’histoire sans fin est paru chez Nevicata / L’âme Des Peuples en 2024.

FR

EAN 9782875231635

96 pages

Disponible en ePub et poche.


Bonnes feuilles…

« Sur les traces de Simenon

Dans ce pays devenu État fédéral en 1993, rien de plus sensible que la notion de territoire. Repartons de L’Écluse et poursuivons vers l’est du pays en rejoignant la soporifique autoroute E40 qui relie Bruxelles à Liège sur une centaine de kilomètres. Elle joue à saute-mouton avec la frontière linguistique : des tronçons sont en Wallonie, d’autres en Flandre, et les panneaux indicateurs des villes sont libellés en français ou en néerlandais, jamais dans les deux langues. L’automobiliste doit donc jongler avec les deux appellations : Beauvechain / Bevekom, Jodoigne / Geldenaken, Tirlemont / Tienen, avant d’arriver à Liège. Si entre-temps on sort de l’autoroute, comment savoir si on est en Flandre ? À la couleur des feux de signalisation. Avant, ils étaient en rouge et blanc sur tout le territoire belge, jusqu’au jour où un ministre flamand a décidé, dans la partie nord, de les repeindre en jaune et noir, couleurs du drapeau flamand.

Située en bord de Meuse, Liège est surnommée la Cité Ardente, et pas seulement pour son glorieux passé sidérurgique. Son tempérament est du genre frondeur, railleur, irrévérencieux… un héritage de cette longue période de 800 ans où elle fut capitale d’une principauté et dut se battre pour préserver son indépendance et ses libertés. Ici, c’est la chaleur de l’accueil qui prévaut : on se tutoie pour un rien.

A l’image du héros local Tchantchès, on ne prend pas l’autre de haut, même au sommet de la montagne de Bueren, un impressionnant escalier de 374 marches. La réputation festive du Carré, en plein centre, n’est plus à faire. Une quarantaine de cafés, restaurants, snacks (et un cinéma) sur une dizaine de rues piétonnisées, et c’est la grosse ambiance de jour et de nuit, toute l’année, avec les étudiants de l’université en acteurs principaux.

C’est justement en fréquentant un cercle d’étudiants, dont l’un se donnera la mort au portail de l’église Saint-Pholien, que Georges Simenon, né à Liège en 1903, en est venu à écrire Le Pendu de Saint-Pholien, une des innombrables enquêtes de son commissaire Maigret. À deux pas, une librairie d’occasion, qui porte le nom du célèbre héros, a été fondée en 1984 avec l’autorisation du maître. Cet écrivain francophone parmi les plus lus au monde est devenu un argument touristique : on peut suivre sa trace tout au long d’un parcours qui passe du magasin où il a acheté sa première pipe à ses domiciles successifs, jusqu’au commissariat qui lui fournissait la matière pour la Gazette de Liège où il a tâté du journalisme. En 1922, Simenon met le cap sur Paris. « J’ai passé ma vie à partir, faute d’une ancre probablement, car je ne suis d’aucun pays« , écrira-t-il. Une phrase très … belge.

La province de Liège est contiguë à la Flandre et aux Pays-Bas, avec la Meuse comme trait d’union. Depuis sa rive droite, une vingtaine de kilomètres au nord, on accède aux Fourons, Voeren en néerlandais. Depuis la fixation de la frontière linguistique, en 1962, cet ensemble de villages verdoyants totalisant 4 000 habitants se situe dans la province flamande du Limbourg. À la fureur des francophones majoritaires, qui ont vainement réclamé le retour dans la province voisine de Liège. Ce porc-épic fouronnais, comme on l’a surnommé, a fait chuter plus d’un gouvernement, mais la question est aujourd’hui réglée : les Fourons restent en Flandre.

Difficile d’imaginer que ces prés bucoliques qui s’étendent face à nous ont pris des allures de Belfast dans les années 1980. Le 9 mars de cette année-là, 2 000 ‘promeneurs’ flamands, la plupart affiliés à des mouvements extrémistes voire paramilitaires, déboulent sur la commune pour en découdre avec les francophones. Casqués et armés de bâtons, ils se retrouvent face à 500 membres de l’Action fouronnaise, dirigée par José Happart, un agriculteur aussi tenace que fort en gueule (et qui deviendra ministre quelques années plus tard). Les gendarmes à cheval chargent les manifestants à travers champs. Un francophone tire à la carabine depuis sa fenêtre, faisant deux blessés, et il s’en faut de peu que sa maison ne soit incendiée… »


L’auteur.e…

Journaliste spécialisé dans l’actualité internationale, notamment pour Le Vif L’Express, François Janne d’Othée a toujours gardé Bruxelles comme port d’attache. Il en connaît autant ses angles attachants que ses recoins moins glamour, et souvent romanesques.

François Janne d’Othée est né en 1959 à Anvers, en Belgique. Il est journaliste indépendant, spécialiste de l’actualité belge et internationale, et grand reporter. Il a antérieurement travaillé comme professeur de lettres au Maroc, comme attaché de presse à l’ONU à New York ainsi que pour des institutions européennes à Bruxelles. Il a également coordonné un réseau européen d’ONG actives en Afrique centrale. Il est diplômé en philologie romane et réside à Bruxelles. [Source : Editions Nevicata]


En savoir plus…

Du même auteur :


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BAKEWELL : Au Café existentialiste (2019)

Ce qu’ils en disent…

[PHILOMAG.COM] Paris, 1932. Trois amis se réunissent dans un célèbre café de Montparnasse. Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir écoutent Raymond Aron, de retour de Berlin, parler d’une forme de pensée radicalement neuve qu’il a découverte : la phénoménologie. « Si tu es un phénoménologue, lance-t-il à Sartre, tu peux parler de ce cocktail et c’est de la philosophie ! » Intrigué et inspiré, Sartre élabore une théorie fondée sur l’existence vécue, dont le quartier de Saint-Germain-des-Prés va devenir l’emblème. L’existentialisme va faire vibrer Paris et se diffuser dans le monde entier, de l’après-guerre aux mouvements étudiants de 1968. Avec l’érudition et l’humour qui ont fait l’immense succès de Comment vivre ?, Sarah Bakewell fait revivre un courant fondateur de l’histoire de la pensée du XXe siècle et nous plonge dans l’atmosphère effervescente du Paris existentialiste. Sarah Bakewell redonne des couleurs à nos penseurs trop souvent figés dans un noir et blanc nostalgique.

BAKEWELL Sarah, Au café existentialiste ; la liberté, l’être et le cocktail à l’abricot est paru chez Albin Michel en 2018, dans une traduction de Pierre-Emmanuel Dauzat et Aude de Saint-Loup. Il est disponible en format poche depuis 2019.

UK > FR

EAN 9782253257837

600 pages

Ce que nous en disons…

[en rédaction]

Patrick Thonart

Bonnes feuilles…

[en construction]

L’auteur…

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) à : Bournemouth , le 03/04/1963
[BABELIO.COM] Sarah Bakewell est une romancière anglaise. Son enfance s’est passée partout en Europe puis en Australie. Revenue à Londres, elle a été conservatrice au département des incunables de la Wellcome Library avant de publier deux biographies remarquées. À Londres toujours, elle anime des ateliers d’écriture à la City University et travaille pour les collections de livres rares du National Trust. Comment vivre ? (How to Live, 2010) a reçu le National Book Critics Circle Award for Biography aux États-Unis, et le Duff Cooper Prize for Non-Fiction en Grande Bretagne. L’ouvrage a également figuré dans la sélection du Costa Biography Award et du Marsh Biography Award.
Site (EN) : http://www.sarahbakewell.com/

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